Protester contre le pétrole n’est pas un crime !
En Ouganda, les autorités répriment les personnes qui critiquent les projets pétroliers. Neuf étudiants ont été arrêtés fin 2022 lors d’une manifestation contre l’oléoduc EACOP. Aujourd’hui libérés sous caution, ils attendent leur procès, accusés de trouble à l’ordre public. Montrons-leur notre solidarité.
Mises à jour AppelÀ Mme Jane Frances Abodo, Directrice des poursuites publiques (ODPP). Copie au Parlement européen et à la représentation de l'UE en Ouganda.
“Stop aux intimidations contre les contestataires d’EACOP et d’autres projets pétroliers ! Abandonnez les poursuites à l’encontre des neuf étudiants.”
La manifestation étudiante pacifique du 4 octobre 2022 a été sévèrement réprimée. D’après des photos, des jeunes hommes ont été bousculés sans ménagements par des policiers lourdement armés. Emmenés au poste, les étudiants ont passé six nuits derrière les barreaux. Cette arrestation violente et l’emprisonnement ont été traumatisantes.
Tout est parti de la contestation de l'oléoduc EACOP (East African Crude Oil Pipeline). Suite au vote d’une résolution du Parlement européen critique envers EACOP, les étudiants ont voulu remettre une pétition au bureau local de l’UE. La police les en a empêché, accusant leur manifestation de provoquer un trouble à l’ordre public.
L’un des inculpés, Lubega Nsamba, dit craindre d’aller en prison pour avoir exprimé son opinion sur le projet EACOP.
Les étudiants ont été libérés contre une caution de 24 euros chacun assortie d’une garantie de 2 430 euros. Ils attendent depuis leur procès. Deux dates d’audience ont déjà été annulées à cause du ministère public.
L’action en justice est angoissante et potentiellement coûteuse pour les accusés. Selon les activistes, l’intention du ministère public est de faire taire les critiques, chose à laquelle il n’est pas parvenu.
« Malgré l’arrestation et le harcèlement judiciaire de ces étudiants, il est encourageant de constater que nous avons des jeunes courageux qui insistent pour participer au développement qu’ils souhaitent », déclare Brighton Aryampa, président de l’organisation Youth for Green Communities. « Nous demandons à l'ODPP d’abandonner cette affaire. »
Soutenons également cette demande.
Faisons savoir aux étudiants qu’ils ne sont pas seuls et que la communauté internationale les soutient.
Ntambazi Imuran Java et deux autres étudiants expliquent dans de courtes vidéos pourquoi ils s’engagent contre EACOP. Leur message : nous ne nous laisserons pas intimider :
ContexteLes groupes pétroliers TotalEnergies et China National Offshore Oil Corporation (CNOOC) veulent installer des centaines de puits dans le nord-ouest de l’Ouganda. Les projets Tilenga et Kingfisher doivent produire 200 000 barils de pétrole par jour. Les forages toucheront également le parc national de Murchison Falls, chose qu’il est possible de contester en signant notre pétition.
Un élément essentiel est l’oléoduc EACOP de 1445 kilomètres jusqu’au port de Tanga en Tanzanie.
De nombreuses organisations de protection de la nature et des droits humains luttent contre EACOP, en dénonçant l’accaparement des terres, la perte des moyens de subsistance de nombreux autochtones et la destruction de l’environnement.
L’extraction du pétrole serait aussi une catastrophe pour le climat. Selon une étude, le projet produirait autant d’émissions de gaz à effet de serre que l’Ouganda et la Tanzanie réunis en 25 ans.
Suite aux protestations du réseau international StopEACOP, dont fait partie Sauvons la forêt, 24 grandes banques et 18 compagnies d’assurance ont déclaré qu’elles ne soutiendraient pas le projet d’oléoduc en Ouganda et en Tanzanie
Notre organisation partenaire Tasha s’oppose également à EACOP.
Témoignage vidéo de l’étudiant Waswa Alex Lyazi : « Le projet pétrolier va provoquer plus de dégâts à la communauté, au monde, à tout le monde. »
Kajubi Maktum, un des autres étudiants arrêtés, déclare :« Le gouvernement nous a fait des menaces et tenté de nous faire peur. Mais nous ne nous laissons pas intimider. »
À Mme Jane Frances Abodo, Directrice des poursuites publiques (ODPP). Copie au Parlement européen et à la représentation de l'UE en Ouganda.
Madame la Directrice,
Nous vous écrivons pour vous faire part de notre inquiétude concernant l’affaire des étudiants qui ont été arrêtés alors qu’ils exprimaient, en toute légalité, leur opinion sur la résolution du Parlement européen relative aux violations des droits humains en Ouganda et en Tanzanie liées aux investissements dans des projets de combustibles fossiles.
Nous demandons à l’OPDD d’abandonner immédiatement les poursuites à l’encontre des neuf étudiants et de s’abstenir d’intimider les personnes qui critiquent EACOP et d’autres projets pétroliers.
Nous vous prions d’agréer, Madame la Directrice, l’expression de notre haute considération.
28 août 2023 : remise des 59 420 signatures de la pétition au bureau du procureur par les militants de l'organisation Youth for Green Communities.
4 septembre 2023 : troisième audience à Kampala. Le ministère public n'avait pas présenté de preuves lors de la première audience et ne s'était pas tout simplement présenté à la deuxième. Malheureusement, le tribunal n'a pas classé l'affaire et a fixé à la place d'autres rendez-vous fin octobre et début novembre. La longue et éprouvante procédure se poursuit donc pour les étudiants. La pétition reste ainsi toujours d'actualité.
Nouvelles arrestations lors d’une manifestation contre l’oléoduc EACOP
Une manifestation pacifique contre l’oléoduc EACOP a de nouveau été dispersée brutalement par la police en Ouganda. Quatre étudiants ont été interpelés pour troubles à l’ordre public. L’un d’eux a contracté la tuberculose en prison. Neuf jeunes hommes sont en procès depuis un an pour des motifs similaires.
Les travaux pour la réalisation d’EACOP et des projets pétroliers connexes Tilenga et Kingfisher ont déjà débuté, avec par exemple la construction de routes d’accès et l’expropriation de personnes.
Le projet peut encore échouer car son financement n’est pas finalisé.
Office of the Director of Public Prosecutions (ODDP) est l’organisme chargé de l’application des lois en Ouganda