Le papetier coréen Moorim détruit la forêt en Papouasie
22 mars 2022
La forêt dense de Papouasie est un paradis pour la biodiversité et les cultures indigènes. Mais depuis quelques années, elle est détruite brutalement par des producteurs d’huile de palme, de copeaux de bois et de papier. Selon une nouvelle étude, l’un des protagonistes est le groupe papetier sud-coréen Moorim.
Le rapport "Trashing the last rainforest" ("Détruire la dernière forêt tropicale") est le fruit d’un an d’enquête approfondie en Papouasie. Sa conclusion : le groupe papetier sud-coréen Moorim Paper, qui prétend agir dans le respect de l’environnement, détruit les dernières forêts tropicales de la province indonésienne. Les auteurs n’ont pas réussi à trouver de chaîne d’approvisionnement exempte de déforestation.
Les recherches, sur ce cas de production de papier soi-disant écologique, ont été menées conjointement par notre organisation partenaire Pusaka ainsi que les ONG Environmental Paper Network (EPN), Mighty Earth, Solutions for Our Climate (SFOC), Korean Federation for Environmental Movement (KFEM) et Advocates for Public Interest Law (APIL).
La filiale de Moorim Papers, Plasma Nutfah Marind Papua (PNMP), a déjà rasé 6 000 hectares de forêt tropicale au cours des six dernières années. La situation pourrait encore empirer puisque PNMP possède une concession forestière de 64 000 hectares.
Selon le rapport, Moorim abat des forêts appartenant à des communautés traditionnelles, impacte la vie et la culture des populations indigènes, détruit sans distinction les étangs de pêche, les terrains de chasse, les jardins de sagou et même les sites sacrés, ne respecte pas les droits des peuples autochtones ni leur droit au consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause.
La Papouasie est une province d’Indonésie occupant la partie occidentale de l’île de Nouvelle-Guinée, entre l’Asie et l’Australie. Elle est caractérisée par une flore et une faune uniques. Les innombrables espèces qu’elle abrite n’ont, pour la plupart, jamais été décrites scientifiquement. Les forêts comprises dans la concession de PNMP n’ont pratiquement pas été étudiées sur le plan biologique.
Les forêts de Papouasie, difficiles d’accès et éloignées des routes commerciales, sont longtemps restées intactes. Mais depuis quelques années se développent, en de nombreux endroits, des plantations géantes dont la production est destinée à l’export. Pour le marché mondial, des écosystèmes entiers sont anéantis, des Autochtones sont dépossédés de leurs terres, menacés et expulsés.
« Le papier est vendu dans le monde entier comme un substitut écologique du plastique, mais il est toujours issu de la déforestation et de la violation des droits des peuples indigènes », déclare Sergio Baffoni du réseau Environmental Paper Network (EPN). « Nous ne pouvons pas sacrifier les derniers paradis de la planète pour des produits qui finissent à la poubelle quelques heures après leur première utilisation. »
« Moorim ne respecte pas les droits des peuples autochtones et provoque ce-faisant des pertes socio-économiques, culturelles et environnementales », explique Franky Samperante, le directeur de Pusaka. « Les indigènes ne peuvent déjà pas satisfaire leurs besoins en nourriture et en eau, en revenus et en harmonie. Cela ne peut pas être compensé par des indemnisations injustes. Le gouvernement doit prévoir des sanctions en cas d’infraction par l’entreprise. »
Le temps presse pour sauver le climat ainsi que les dernières forêts de notre planète et les personnes dont la vie en dépend. Le temps est venu de redoubler d’efforts pour rompre le lien entre la production de marchandises et la destruction des habitats et territoires précieux de notre planète.
Pour les auteurs du rapport, Moorim doit arrêter se cacher derrière une façade "écologique" et changer ses méthodes. Dans le cas contraire, ils appellent acheteurs, investisseurs et partenaires commerciaux à rompre leurs relations avec le groupe papetier.