« Ils exportent notre sang » : SOS des autochtones face à l’industrie de l’huile de palme au Brésil

Un groupe d’autochtones proteste dans une rue de la ville de Belém. Ils portent une bannière portant l’inscription : « Les peuples Tembé et Quilombola de la vallée de l’Acará crient. BBF nous tue. BBF hors de notre territoire » Les indigènes du peuple Tembé manifestent à Belém contre la violence et l’accaparement des terres par la compagnie d’huile de palme Brasil Biofuels / BBF (© Movemento IRQ) Deux femmes derrière une haute porte grillagée sont contrôlées par un garde de la société Agropalma. Le panneau de l’entreprise porte l’inscription : "Agropalma. Contrôle de l’accès au cimetière Nossa Senhora da Batalha. Propriété privée" La société Agropalma bloque et contrôle les mouvements de la population, même pour aller au cimetière (© Avispa Mídia) Un groupe de personnes lors d’une réunion dans une cabane ouverte Des activistes de Sauvons la forêt, CIMI, FASE et WRM rendent visite à une communauté pour discuter de la situation des droits humains dans la vallée d’Acará, État du Pará, Brésil (© Maia Schenck)

À l’est de l’Amazonie brésilienne, les populations locales accusent les producteurs d’huile de palme de s’être appropriés de grandes surfaces de terres pour leurs plantations. Elles demandent aux autorités nationales la restitution de leurs terres ancestrales et la protection contre les violences graves et récurrentes. Soutenons-les !

Appel

À : Président, Ministère des Peuples autochtones, Fondation nationale pour l’Indien (FUNAI), Institut national de la colonisation et de la réforme agraire (INCRA) et Conseil national des droits de l'homme de la République fédérative du Brésil

“L’État brésilien doit assumer ses obligations constitutionnelles envers les autochtones, dont la reconnaissance de leurs droits fonciers et la sécurité.”

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La vallée d’Acará, dans l’État du Pará, est le centre de l'industrie de l’huile de palme en pleine expansion au Brésil. Des activistes de Sauvons la forêt ont visité cette région à l'est de l’Amazonie et rencontré les communautés avec lesquelles un plan d’aide a été convenu.

Sur place, les peuples indigènes Tembé et Turiwara, ainsi que des quilombolas (descendants d’esclaves originaires d’Afrique) vivent coincés au milieu des plantations de palmiers à huile et sont harcelés. Réunis au sein du mouvement IRQ (Indigènes, Riberinho et Quilombolas), ils se disent victimes d’accaparement des terres, de déplacements forcés et de nombreuses violences.

« Agropalma et BBF n’exportent pas de l’huile de palme, ils exportent notre sang », ont déclaré les représentants indigènes à plusieurs reprises.

Les plus grands exploitants de plantations d’huile de palme sont les sociétés Agropalma et Brasil Biofuels (BBF), qui contrôlent à elles seules un territoire de 2 400 km2, soit plus de 20 fois la superficie de Paris.

Cependant, une grande partie des zones forestières provient manifestement de l'appropriation de terres ancestrales de communautés indigènes et quilombolas. Les tribunaux ont ainsi jugé illégaux et annulé des titres fonciers d’Agropalma, portant sur des centaines de km2. Mais les terres n’ont toujours pas été restituées.

Les communautés locales continuent à subir d’importantes pressions et persécutions, de fortes restrictions dans leur liberté de mouvement et mode de vie. Violences, menaces de mort, humiliations, racisme et criminalisation sont monnaie courante dans la région et plusieurs personnes ont déjà été gravement blessées ou tuées.

Les services de sécurité privés armés des entreprises, la police locale et les bandes criminelles seraient à l’origine de ces actes. Les sociétés rejettent toutes les accusations et continuent de revendiquer les terres.

Tembé et quilombolas dénoncent la violence structurelle et demandent la restitution de leurs territoires ancestraux. Ils appellent à l’aide et à la solidarité de la communauté internationale.

Soutenons-les !

Contexte

En raison des conflits et de la violence rapportés de la vallée d’Acará, des activistes de Sauvons la forêt et des organisations CIMI, FASE et World Rainforest Movement (WRM) se sont rendus sur place en août 2023. Ensemble, nous avons rencontré les membres des communautés affectées avec qui un plan d’aide a été convenu. 

La première chose que l’on nous a dite à notre arrivée fut : « Il n’y a qu’une seule alternative : partir ou résister. »


Informations supplémentaires

En français

En anglais

En espagnol

Avispa Midia est une organisation partenaire de Sauvons la forêt.

En portugais


Destinataires de la pétition

En plus de signer la pétition, il vous est possible de contacter directement ses destinataires :

  • M. Luiz Inácio Lula da Silva, Président
  • Ministère des Peuples autochtones
  • Fondation nationale pour l’Indien (FUNAI)
  • Institut national de la colonisation et de la réforme agraire (INCRA)
  • Conseil national des droits de l’homme 

de la République fédérative du Brésil

Ambassade du Brésil en France
34, cours Albert 1er
75008 Paris
Tel : +33 (0)1 45 61 63 00
Courriel : brasemb.paris@itamaraty.gov.br

Lettre

À : Président, Ministère des Peuples autochtones, Fondation nationale pour l’Indien (FUNAI), Institut national de la colonisation et de la réforme agraire (INCRA) et Conseil national des droits de l'homme de la République fédérative du Brésil

Monsieur le Président,
Madame, Monsieur,

Le Conseil national des droits de l’homme (recommandation  n° 16 du 8 août 2023)* et la Rapporteuse spéciale des Nations unies sur la situation des défenseurs des droits de l’homme au Brésil (avril 2024)** s’accordent à dire que le gouvernement brésilien doit agir de toute urgence pour lutter contre l’escalade actuelle des conflits, de la violence et des atteintes faites aux communautés indigènes et traditionnelles.

La principale cause de la violence structurelle à l’encontre des communautés autochtones et quilombolas est l’absence de reconnaissance et de délimitation de leurs territoires ancestraux, dont l’État brésilien porte l’entière responsabilité.

Dans le nord-est de l’État du Pará, de vastes étendues de terres sont aux mains d’entreprises d’huile de palme. Celles-ci bénéficient du soutien total de l’État brésilien, manifestement peu soucieux des graves conséquences sociales et environnementales de l’accaparement des terres par l’industrie de l’huile de palme, ni de la déforestation et de la pollution causées par les plantations de palmiers à huile.

Alors que deux sociétés, Brasil Biofuels (BBF) et Agropalma, occupent à elles seules une zone de plus de 240 000 hectares, les territoires indigènes officiellement délimités par l’État brésilien dans la région s’étendent sur une superficie de seulement 147 hectares : la terre Turê-Mariquita du peuple Tembé est la plus petite zone indigène officiellement délimitée au Brésil.

Il en résulte d’importants dégâts et conflits socio-environnementaux complexes, avec des morts et de graves conséquences pour la population. Les plaintes et rapports successifs déposés par les communautés indigènes auprès des autorités compétentes sont restés jusqu’à présent en grande partie vains.

Les communautés Tembé, Turiwara et quilombola ont besoin non seulement de la reconnaissance et de la démarcation de leurs territoires, qui leur reviennent de droit, dans les plus brefs délais, mais également de la protection de l’État brésilien contre les violences et les violations des droits humains.

« Agropalma et BBF n’exportent pas de l’huile de palme, ils exportent notre sang », ont déclaré les représentants à plusieurs reprises. Les forces de sécurité armées des entreprises d’huile de palme doivent être retirées, les employés et les partenaires commerciaux de BBF et d’Agropalma doivent se conformer à la loi et ne doivent en aucun cas compromettre davantage la sécurité et les droits des communautés locales.

Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président, Madame, Monsieur, l’expression de notre profond respect.

* CONSELHO NACIONAL DOS DIREITOS HUMANOS, RECOMENDAÇÃO Nº 16, DE 08 DE AGOSTO DE 2023 : https://www.gov.br/participamaisbrasil/blob/baixar/28956

**  Ministério dos Direitos Humanos e da Cidadania, 19.4.2024. Relatora da ONU exalta empenho do governo federal na proteção de defensores de direitos humanos : https://www.gov.br/mdh/pt-br/assuntos/noticias/2024/abril/relatora-da-onu-exalta-empenho-do-governo-federal-na-protecao-de-defensores-de-direitos-humanos

L'huile de palme en 5 minutes

Situation actuelle : la forêt tropicale dans les véhicules et les assiettes

Avec 66 millions de tonnes par an, l’huile de palme est l’huile végétale la plus produite de la planète. Un prix particulièrement bas sur le marché mondial et des propriétés convenant particulièrement au processus de transformation industrielle des aliments ont fait que l’huile de palme est présente aujourd’hui dans un produit sur deux dans les supermarchés : pizzas surgelées, biscuits, margarine, crème pour le corps, savon, maquillage, bougies, lessive…

Ce que presque personne ne sait : près de la moitié des importations d’huile de palme dans l’union européenne est consommée sous la forme de biocarburants. La loi de 2009 sur l’incorporation obligatoire d’agrocarburants dans l’essence et le diesel est ainsi une cause majeure de déforestation tropicale.

À ce jour, les plantations d’huile de palme s’étendent sur 27 millions d’hectares à travers le monde, soit un territoire grand comme la Nouvelle-Zélande d’où ont été chassés habitants et animaux pour faire place à un « désert vert ».

Les conséquences : la mort dans le sachet de soupe en poudre

Les palmiers à huile trouvent des conditions optimales de croissance dans les chaudes et humides régions tropicales près de l’Équateur. En Asie du Sud-Est, en Amérique du Sud et en Afrique, d’immenses zones
de forêts tropicales sont défrichées et brûlées, jour après jour, pour faire de la place aux plantations. Ce faisant, de grandes quantités de gaz à effet de serre sont émises dans l’atmosphère. L’Indonésie, premier producteur d’huile de palme de la planète, a ainsi émis plus de gaz à effet de serre que les États-Unis d’Amérique au cours de l’année 2015. Les émissions de CO2 et de méthane rendent les biocarburants à base d’huile de palme trois fois plus nocif pour le climat que les carburants à base de pétrole.

Mais le climat n’est pas le seul touché : avec les arbres disparaissent des espèces rares comme l’orang-outan, l’éléphant pygmée de Bornéo ou le tigre de Sumatra. Paysans et populations autochtones, qui depuis des générations vivent dans la forêt et la préservent, sont souvent brutalement expulsés de leur terres. A ce jour, 700 conflits fonciers en rapport avec l’industrie de l’huile de palme ont été recensés en Indonésie. Et les plantations gérées de « manière durable » ou « bio » ne sont pas exemptes de violations des droits humains de la population.

Nous, consommateurs, en entendons peu parler. Pourtant, notre absorption quotidienne d’huile de palme est nocive pour notre propre santé : l’ huile de palme industrielle raffinée est riche en contaminant génotoxiques et cancérigènes comme l’a alerté l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) au cours de l’été 2016.

La solution : changer radicalement nos modes d’alimentation et de déplacement

Il ne reste plus que 70 000 orangs-outans dans les forêts d’Asie du Sud-Est. La politique européenne de soutien aux biocarburants pousse les grands singes toujours plus au bord de l’extinction : chaque nouvelle plantation de palmier à huile détruit une partie de son habitat naturel. Nous devons faire pression sur les politiques pour aider nos plus proches parents. Mais il existe des pratiques quotidiennes pouvant déjà apporter beaucoup.

Ces conseils simples vous aideront à savoir où l’huile de palme se cache et comment l’éviter :

  1. cuisiner soi-même : biscuits poire - amande - noix de coco ? Pizza pomme de terre romarin ? Transformer soi-même des aliments frais permet d’éviter tous les plats préparés contenant de l’huile de palme de l’industrie agroalimentaire. Les huiles végétales européenne telles que l’huile d’olive, de tournesol ou de colza s’adaptent à quasiment toutes les recettes.
  2. lire les étiquettes : la présence d’huile de palme doit être indiquée sur les emballages alimentaires depuis décembre 2014. Mais pas pour les cosmétiques mais et les produits ménagers où elle se cache sous la forme de termes techniques. Il est très facile de trouver des alternatives sans huile de palme sur internet.
  3. le client est roi : « Quels produits sans huile de palme proposez-vous ? Pourquoi n’utilisez pas des huiles locales ? » Poser de telles questions aux fabricants peut leur faire craindre pour la réputation de leurs produits. La pression publique et la prise de conscience accrue du problème a déjà incité plusieurs producteurs à renoncer à huile de palme.
  4. Signer des pétitions et interpeler les politiques : les pétitions en ligne permettent de faire pression sur les politiques responsables des importations d’huile de palme. Avez-vous déjà signé toutes les pétitions de Sauvons la forêt ?
  5. Se faire entendre : les manifestations et autres actions collectives permettent d’atteindre le public et les médias. Ainsi s’accroît la pression sur les décideurs politiques.
  6. Renoncer à la voiture : il est très facile de réaliser la plupart de nos trajets à pied, à vélo ou avec les transports en commun.
  7. Savoir et faire savoir : les milieux économiques et politiques veulent nous faire croire que les biocarburants sont bons pour le climat ou qu’il est possible de produire de l’huile de palme de manière durable. Sauvonslaforet.org informe sur les conséquences de la culture industrielle de l’huile de palme.

Plus d’informations

Footnotes

Brasil Biofuels (BBF)

Voir notre article  "Sommet pour l’Amazonie : la violence au cœur des préoccupations des autochtones"

240 000 ha de terres occupées les producteurs d’huile de palme
147 ha de territoire indigène officiellement reconnu

Cette pétition est également disponible en :

49 190 signatures

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