Braconnage en Asie

Dépouilles de tigres et autres félins de provenance illégale rangées dans des étagères © Ryan Moehring / USFWS - CC BY 2.0

Le braconnage est un problème majeur dans de nombreux pays d’Afrique, d’Amérique du Sud et d’Asie, où vivent des animaux dont les produits dérivés sont vendus à prix d’or au marché noir. Les braconniers et le crime organisé derrière leur pratique ont des effets désastreux sur la biodiversité et menacent la survie de nombreuses espèces.

Quelle est la situation du braconnage en Asie ?

L’Asie n’est pas seulement touchée par le braconnage. On y assiste également à l’émergence de marchés noirs dans lesquels sont commercialisées toutes sortes de marchandises illégales en provenance d’Asie et surtout d’Afrique. La médecine traditionnelle est la cause principale du braconnage, notamment en Chine. La croyance dans le pouvoir de guérison attribué à la poudre de rhinocéros, aux os de tigre ou autres parties d’animal est répandue dans de nombreux groupes de population asiatiques. De plus, l’ivoire est considéré comme un symbole de richesse. Il est également utilisé comme complément alimentaire ou stimulateur de virilité. Phénomène préoccupant : en Asie, des espèces de tigres très rares sont également braconnées et vendues. Ainsi, certaines espèces sont aujourd’hui éteintes ou en passe de disparaître.

Dans quelles régions le braconnage est-il le plus répandu ?

En Asie, la zone insulaire indomalaise et la péninsule asiatique sont fortement concernées, mais le braconnage touche aussi les deux grandes îles de Bornéo et de Sumatra, ainsi que la Thaïlande et le Vietnam. Le braconnage des primates est particulièrement répandu dans la partie indonésienne de Bornéo. Selon les estimations, plus de 1000 orangs-outans sont vendus chaque année dans le pays. Sur les marchés internationaux, des prix records pouvant atteindre 40 000 dollars sont proposés pour certains animaux. En Inde et en Thaïlande, les tigres sont souvent braconnés, car ces pays abritent les plus grandes populations de tigres encore présentes en Asie.

Quels sont les animaux les plus touchés ?

En Asie, le tigre a déjà presque disparu, car il est traqué et massacré sans pitié. L’espèce la plus chassée est de loin le tigre de Chine méridionale, dont une trentaine d’individus, tout au plus, subsisteraient dans le monde. Mais cette espèce est peut-être déjà même éteinte, car le dernier signalement de spécimen vivant à l’état sauvage date de 1964. La population de tigres de Sumatra est estimée à environ 400 individus. Leur chance de survie est donc incertaine. Le tigre de Java, le tigre de Bali et le tigre de la Caspienne ont déjà disparu à cause du braconnage. Dans ce contexte, la destruction de l’habitat des animaux joue un rôle majeur, surtout en Asie du Sud-Est, et plus particulièrement à Sumatra et à Bornéo, où les forêts tropicales sont déboisées à un rythme soutenu. Outre les animaux de grande taille comme les tigres et les singes, les serpents, les rongeurs, les pangolins, les tortues, les crocodiles et les oiseaux sont également braconnés. Parmi les singes, les espèces les plus concernées sont les langurs, les makis et les grands singes (orangs-outans et gibbons). 11 des 25 espèces de primates les plus menacés vivent en Asie. Un maki indonésien récemment découvert, qui n’a pas encore de nom, en fait également partie.

Pourquoi les animaux sont-ils braconnés ?

En Asie, le braconnage est perpétré pour des raisons principalement commerciales. Le commerce illégal de produits issus du tigre est en plein boom en Chine. Presque toutes les parties du tigre sont considérées comme un remède dans la médecine traditionnelle chinoise : ses pattes sont utilisées pour soigner l’insomnie, ses dents sont réduites en poudre pour faire baisser la fièvre et ses os sont censés combattre les rhumatismes. Mais le tigre n’est pas le seul animal utilisé dans la médecine traditionnelle : jusqu’à 1 500 espèces différentes sont censées avoir des pouvoirs de guérison, dont le rhinocéros par exemple. Une partie des animaux braconnés est proposée comme souvenirs de vacances comme les sculptures en ivoire ou les oiseaux ou reptiles vivants. Leur viande est également proposée comme mets de choix dans les restaurants, notamment au Vietnam où de nombreux établissements ont de la viande de singe au menu. Karl Ammann, un protecteur de la nature et photographe animalier suisse, explique que manger des espèces animales rares est devenu une mode en Asie. « Dans certaines fêtes asiatiques, des pénis de tigre et de la poudre de rhinocéros circulent comme la cocaïne ailleurs. », rapporte Ammann. Les touristes allemands s’achètent également des « souvenirs » animaux. Selon l’IFAW (Fonds International pour le Bien-Être des Animaux), le bureau principal des douanes de Francfort a saisi plus de 4000 animaux vivants et environ 15 000 produits fabriqués à partir d’espèces végétales ou animales protégées en 2011. Les importations illégales proviennent principalement de touristes. Sur les îles de Bornéo et Sumatra, de nombreux orangs-outans sont également braconnés par la population locale pour leur viande. Ce faisant, un grand nombre de jeunes orangs-outans devenus orphelins sont vendus comme animaux de compagnie ou de cirque.

Combien rapporte le braconnage ?

Un seul tigre peut rapporter jusqu’à 15 000 euros sur le marché noir. Pour ce qui est du rhinocéros, les prix oscillent entre 20 000 à 50 000 dollars par kilo de corne. Une seule corne peut se vendre 60 000 dollars. La demande en orangs-outans est énorme. Le prix des orangs-outans et de leurs bébés a augmenté de 1000 % au cours des six dernières années. Ce commerce enrichit de nombreuses personnes, mais pas les braconniers, qui tuent leurs proies pour 50 000 roupies, soit environ 3 euros. C’est ce que leur donnent les donneurs d’ordres situés dans les villages le long des fleuves du centre de Bornéo. Pour un bébé vendu, le braconnier tue en moyenne six mères et leur progéniture, car la plupart des bébés vivant dans les cimes des arbres ne survivent pas à la chute pouvant atteindre 40 mètres. Les commerçants du fleuve échangent les orphelins auprès des capitaines de bateau, qui naviguent de l’intérieur des terres vers la côte, contre une radio usagée, par exemple. La valeur des singes est déjà passée à 70 euros. Les orangs-outans sont ensuite transportés dans de minuscules cages sans nourriture au gré des intermédiaires et des bateaux en bois circulant entre les îles indonésiennes. Ils atteignent Singapour ou les grandes villes de Java, Thaïlande et Taïwan, où les acheteurs doivent alors débourser près de 350 euros pour faire leur acquisition. Les prix les plus élevés sont atteints en Amérique, où un bébé orang-outan coûte 20 000 dollars américains. Le nombre d’orangs-outans au kilomètre carré vivant à Taipeh, la capitale de Taïwan, est plus élevé qu’au Kalimantan, la partie indonésienne de Bornéo, d’où ces animaux sont pourtant originaires.

Qu’advient-il des animaux orphelins ?

Les jeunes primates sont vendus dans des villes d’Asie pour divertir les humains, comme animaux de compagnie, enfants de substitution ou « chien-chien ». Les orangs-outans retenus en captivité vivent environ 15 ans, alors qu’ils peuvent vivre jusqu’à 50 ans dans la nature. Bien qu’il soit interdit en Indonésie de détenir un primate comme animal de compagnie et que la population soit avertie des dangers que cela comporte, les propriétaires de ces animaux n’ont pratiquement rien à craindre des autorités.

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